top of page

Incestes et déni social

Février 2025

par Pauline Guérisse

​

 

L’actualité révèle des violences faites à des enfants dans une institution censée les protéger. A chaque fois, pour ce genre de faits, l’horreur suscite la stupeur. « Comment est-ce possible ? », est la question que l’on se pose.

Dans l’imaginaire collectif, les abus sexuels sur enfants, puisqu’ils sont interdits, n’existent pas. Du moins ils restent rares. Quand ils existent, on se dit qu’ils sont commis par des personnes déséquilibrées. L’horreur ne peut être commise que par un monstre, pas par quelqu’un d’ordinaire. Nous sommes tous formatés à concevoir les abus sexuels sur enfant comme exceptionnels. Donc on ne voit pas et parfois on n’entend pas la parole de l’enfant.  Les abus sur les enfants sont un impensé systémique. En réalité les abus sur mineurs, tout comme les violences éducatives ordinaires, sont les émanations d’un système de domination invisible puisqu’intériorisé et sont commis par des personnes totalement intégrées dans la société. Ce système de domination s’auto-perpétue par le silence de la victime et de l’environnement.

Ici je citerai deux écrits à lire pour comprendre la mécanique du déni collectif et son ampleur : celui de Dorothée Dussy (anthropologue, directrice de recherche au CNRS) : Le berceau des dominations, anthropologie de l’inceste et celui d’Edouard Durand (juge ayant présidé la CIVISE) 160 000 enfants, violences sexuelles et déni social. Tous les deux soulignent l’aspect systémique des violences et abus sexuels sur enfants. Ils  ont mis au jour dans leurs recherches, le mécanisme du déni collectif.

Cette mécanique fait écho à celle qu’on remarque  en intra-familial. Tout thérapeute constate dans sa pratique clinique la triste fréquence des violences et peut témoigner que pour chaque victime, le chemin est long et douloureux  pour exhumer les faits, sortir de l’interdiction à se souvenir et à dire, faire face à l’incrédulité et au déni (voire au  rejet) de l’entourage, et enfin  pour se reconstruire.

Sortir du silence est une œuvre collective.​

bottom of page